Les grandes collections et leur contribution à la naissance des Musées
Les Collections des papes :
Au 15e siècle, c’est Sixte Quint qui rassemble au Capitole un certain nombre de statues antiques en bronze dont la fameuse louve romaine et le spinario. Le Pape guerrier, Jules II (1503-15..) établit les bases de la vraie collection papale au Vatican , premier musée profane privé pour un souverain « spirituel », dans la cour du Belvédère, en confiant à l’architecte Bramante la tâche d’organiser le placement de son Apollon, acquis alors qu’il était encore Cardinal, l’exceptionnel groupe du Laocoon , l’Ariane endormie(à l’époque faussement intitulée Cléopâtre), le Commode en Hercule, la Vénus Félix, le Tibre colossal, Hercule et Antée, etc. Toutes les semaines, on découvre dans les ruines romaines des statues enfouies, parfois brisées, parfois incomplètes ; et tout ça parce que les Papes et toutes les grandes familles romaines se servent sans scrupule aucun de marbres et de pierres des restes monumentaux de la Rome antique. Les Barberini oncle (le Pape Urbain VII) et neveu (le cardinal Francesco) vont même, pour alimenter le chantier de leur palais, jusqu’à desceller des pans entiers de l’immense arène du COLISÉE, ce qui fait gronder la populace et leur vaut une pasquinade … : « Quod non fecerunt Barbari, fecerunt Barberini » ! C.à.d. = « ce que n’auront pas fait les Barbares, les Barberini l’ont fait » !
A Rome, au 16e, 17e et 18e siècles, on construit, on décore, on embellit églises, Palais, places publiques et édifices divers, avec l’argent des Papes enrichis, de leurs familles, parvenues ou pas, de leurs alliés, et Rome devient elle aussi un réservoir de collections. Car la frénésie des « Patrons de l’Art »se répand dans toute l’Italie, avec les grandes familles italiennes et les potentats locaux. Ainsi les Farnèse, les Borghèse, les Albani, les Gonzague, les Pamphili, et j’en passe tant d’autre s, se constituent de solides collections tant dans l’Antique que dans la production de leur temps.
• Signalons que la toute première « expertise archéologique « de l’Histoire est entreprise sur le groupe hellénistique du LAOCOON, découvert en 1506 sur la colline romaine de l’Esquilin, dans les Thermes de Trajan. On soupçonne l’ensemble d’être composé de quatre pièces de marbre habilement accolées. Une nouvelle science est née.
Pour en revenir au Vatican, c’est en confiant à Michel Ange la voûte, le plafond de la chapelle Sixtine afin d’y peindre une œuvre magistrale, et à Raphaël la décoration illustrée des chambres de l’appartement papal que Jules II lance vraiment la création d’un musée artistique unique des plus grands génies italiens, base des fameux Musées du Vatican. Ces Musées sont enrichis par la construction de la magnifique Galerie des Cartes géographiques, fin 16e siècle. A la fin du XVIIIe siècle, Clément XIV puis Pie VI regroupent les plus belles statues antiques grecques et romaines dans un nouveau musée au Vatican, le Pio Clementino. C’est là qu’on expose un Apoxyomène, l’Apollon dit du Belvédère, le Laocoon, l’Ariane, les Muses, une Aphrodite de Cnide etc. Encore plus tard, au tout début du 19e siècle, travaillant pour Pie VII, le fameux sculpteur néo-classique Antonio Canova organise le musée dit Chiaramonti . On y regroupe environ mille pièces de sculpture (statues, bustes, bas-reliefs) romaine. S’y ajoute depuis 1839 un musée de l’Antiquité égyptienne, et enfin, en 1931, la Pinacothèque vaticane, décidée par Pie XI, réservée à la collection des peintures des Papes, œuvres allant du Moyen Age jusqu’en 1800.
Avant de quitter l’Italie, arrêtons-nous un instant pour inclure dans notre narration un musée d’un genre inédit. En effet je considère comme un véritable « Musée par Ecrit » le célèbre ouvrage de Giorgio Vasari intitulé « Le Vite de ‘piu eccelenti pittore, scultori e architettori » , un recueil biographique des artistes de la grande Renaissance italienne, mais surtout un ouvrage de référence fondateur de l’Histoire de l’Art ! Lui-même peintre émérite, et architecte fort actif, Vasari va étudier la vie de plus de 40 artistes qui deviennent sans discussion les noms les plus célèbres et les plus côtés d’Europe pour trois siècles à venir. Depuis Cimabue, Giotto et Botticelli jusqu’au Titien, en passant par les génies que sont Michel Ange et Raphaël, ces biographies compilées par Vasari répandent dans le monde des connaisseurs et des princes cette liste « excellente »qui va rester pour très longtemps la référence des collections et des musées.
• Pour de plus amples détails sur les collections des Familles italiennes princières, se référer à notre Addendum A en fin d’article.
De François I à Louis XIV en passant par Richelieu et Mazarin
Après avoir sillonné entre 1515 et 1524 le nord de l’Italie en campagne militaire, le roi de France François Ier en rapporte le goût du Beau, et introduit en force la Renaissance artistique. « Roi Chevalier », il protège Léonard de Vinci dans ses dernières années, puis utilise des artistes italiens pour embellir et rénover le château royal de Fontainebleau. Son royaume, sorti définitivement de la Guerre de Cent Ans et des sombres châteaux-forts médiévaux, va progressivement se mettre au goût italien. Encore un siècle et ce sont, début XVIIe, les (Premiers) ministres des souverains de la dynastie des Bourbon qui se lancent dans des acquisitions artistiques massives qui témoignent de leurs fortunes personnelles démesurées comme elles rehaussent leurs prestige de « Grands serviteurs »d’un « Grand Royaume ». Il s’agit bien entendu des Cardinaux de Richelieu et Mazarin. Leurs collections, conservées dans des demeures quasi-royales, comportent énormément de peintures, des camées, des pièces d’orfèvrerie, mais aussi des sculptures antiques souvent retouchées par les vendeurs. Car l’Italie exporte le produit des fouilles effrénées menées sur son sol, et les artistes du temps « réarrangent »des morceaux de marbre afin de « compléter » des statues, leur octroyer des titres et origines qui flattent l’engouement européen pour la mythologie gréco-romaine. D’ailleurs plusieurs peintres et sculpteurs, même renommés, ajoutent à leur métier celui de marchand d’Art, pour arrondir leurs rentrées pécuniaires. Tout comme certains d’entre eux conseillent leurs ‘protecteurs’, ce qui met à la tête des collections princières des artistes reconnus, tel Rubens qui fut pendant 8 ans le Conservateur de la collection du duc de Mantoue, ou Arcimboldo qui officia auprès de l’empereur Rodolphe II de Habsbourg. Dans les collections de Richelieu et de Mazarin, il y a à boire et à manger, entre peintures originales, copies dites de l’école du maître, statues modifiées (pas toujours avec bonheur ! Souvent trompé par ses fournisseurs, qui opéraient à distance, Mazarin se faisait conseiller par le peintre Mignard lorsqu’il lui parvenait des lots de tableaux d’Italie. –Pour exemple, on lui fit acheter un Lanfranc pour un Carrache.
Le cardinal de Richelieu rassembla sa collection dans le château de Richelieu, au milieu du bourg que le Ministre-Cardinal voulut construire de toutes pièces dans sa Touraine natale ainsi qu’à Paris au Palais-Cardinal (futur Palais-Royal) et en banlieue parisienne au château de Rueil (disparu).Cette collection comprenait de l’Antique à profusion avec des tableaux de peinture contemporaine du Grand ministre.
Le grand mérite de la collection Mazarin est d’être à la base de celle de son pupille, Louis XIV. Ayant accumulé une fortune colossale, et toujours inquiet sur son statut personnel et politique, Mazarin va en effet léguer, plusieurs mois avant son décès, une énorme partie de ses richesses au jeune roi. Lequel va amplement mériter son titre historique de « Roi Soleil » non seulement par son long règne tout empreint de contrôle ferme de la France et la projection de la puissance française sur toute l’Europe, mais aussi par son patronage des Arts et des manufactures, qui trouve son zénith dans le magnifique et inégalable château de Versailles. Véritable musée avant la lettre, Versailles arbore avec éclat et profusion toutes les grandes beautés des artistes et des artisans du 17e siècle, tant en peinture, sculptures (antiques et contemporaines), moulages, marqueterie, ébénisterie, qu’en art des jardins et des jeux d’eaux. Versailles est si somptueux qu’avec ce château, ce qu’il contient et ce qu’il présente, la France règne sans partage sur le goût et les Arts. On vient de partout pour admirer le « joujou »de Louis XIV, un joujou qui coûta des milliards au trésor public et qui mobilisa pendant près de 30 ans plus de 30 mille ouvriers. Quand on évoque le « Grand Siècle » de Louis XIV, lorsque l’on veut illustrer le style « Classique », c’est immanquablement vers Versailles que l’on se tourne.
Vous vous demanderez si Versailles peut être qualifié de musée, puisqu’il est la demeure d’un homme et de sa cour, aussi étendue et flamboyante peut-elle être. Je vous dirai que oui, car s’il fallait être noble ou militaire pour accéder aux salles du château, il suffisait pour le commun des mortels de louer à l’heure aux grilles de Versailles un chapeau et une canne, ou une épée, afin de rentrer se promener dans ce gigantesque ensemble où chaque pièce, chaque parterre du parc est un modèle du genre. Eh oui, le petit peuple pouvait non seulement entrer dans le palais de Louis XIV, mais il pouvait également assister aux repas du souverain, derrière des cordons tendus à cet effet. Toujours majestueux dans ses apparences en public, Louis XIV se produisait journellement en représentation devant les nobles mâtés et domestiqués, mais aussi, dans les appartements de parade devant ses sujets les plus modestes et les plus anonymes. Encore fallait-il que ces derniers fassent un voyage long et coûteux de Paris ou de la province pour atteindre cette merveille de palais tant célébré. Les jardins et les fontaines sont truffés de statues et groupes sculptés, copies d’antiques ou œuvres originales du 17e, offerts au regard du promeneur. Tout à Versailles respire l’Art, et installe la France en position incontestable d’arbitre des styles pour les deux siècles à venir.
Donc, Versailles est un musée complet, et un « leader »des goûts et des Arts de son temps, que l’on se doit de visiter si on le peut. Tant et si bien qu’à travers l’Europe, pendant plus d’un siècle, et pour plus de vingt cas, des rois et des princes vont tenter d’imiter le château et d’en reproduire (partiellement) le plan ou le faste.
• Ainsi : A Bonn, l’Augustusburg- à Berlin : Charlottenburg, et Potsdam :, le « Neues Palais » ; -à Vienne : Schönbrunn ; à Naples : Caserta ; -à Parme : Colorno ; -à Turin : Stupinigi ; en Pologne : Wilanow ; -à Stockholm: Drottningholm ; en Hanovre : Herrenhausen ; -à Cassel : Wilhelmshohe ; à Ludwigsburg, le château du même nom ; -en Lorraine : Lunéville ; -et surtout, deux cent ans plus tard, pour Louis II de Bavière : le Herrenchiemse ;
• Mentionnons également que les avenues en forme de patte d’oie de la ville de Versailles, qui convergent toutes vers la Place d’Armes devant le château, ont été reprises à Mannheim, Karlsruhe, à Saint-Pétersbourg, à Stupinigi, à Ludwigsburg, et surtout à Washington DC, capitale des USA !
• Aujourd’hui, devenu un musée à temps complet, Versailles reçoit plus de quatre millions de visiteurs par an.
Pour revenir aux collections de Louis XIV, il faut signaler qu’elles eurent aussi pour point de départ toutes les merveilles que le roi confisqua à son surintendant des Finances, Nicolas Fouquet dans l’exquis château de Vaux-le-Vicomte. Ayant pris ombrage de l’étalage qu’en fit l’imprudent Fouquet, lors d’une fête mémorable donnée en l’honneur du Roi en août 1661, ce dernier fit arrêter son grand argentier qui passa de longues années en prison où il mourut en 1680. C’est Fouquet qui, avec Vaux, fit la renommée de Le Brun (peintre), Le Vau (architecte), Le Nôtre (jardinier paysagiste), lesquels furent tous recrutés sans état d’âme par Louis XIV qui les mit à contribution, notamment à Versailles, les rendant immortels dans leurs ouvrages respectifs.
Mais le jeune frère du Roi-Soleil, Philippe Duc d’Orléans, simplement appelé « Monsieur », n’est pas en reste comme collectionneur. Dans son beau château de Saint-Cloud, sur une colline surplombant la Seine et qui jouit d’une vue imprenable sur Paris, avec des salons peints et décorés par Mignard, il accumule 131 objets précieux en cristal de roche-jaspe-agathe-jade etc. + Des panneaux en laque du Japon + 23 Tableaux surtout français du 17e siècle (dont le fameux portrait allégorique de Louis XIV et sa famille par Jean Nocret-), ainsi que des hollandais ; mais quand même un Titien, un Véronèse, un G Reni et des Van Dyck. + Des bijoux, des statuettes (il ne faut pas concurrencer le Roi, si ombrageux, en touchant aux statues de dimension importante) en bronze, argent, albâtre, antiques et contemporaines du 17e, des œuvres en cristal de roche, soieries + coffres et cabarets laqués de Chine , panneaux en laque du Japon, tapisseries de la Savonnerie , enfin un cabinet de curiosités , etc.
Son fils, Philippe, qui sera Régent du Royaume pendant la minorité de Louis XV, continuera le mouvement en rajoutant entre 1700 et 1723 plus de 500 peintures à Saint-Cloud et surtout au Palais-Royal à Paris ; dont la collection de la Reine Christine de Suède avec 123 œuvres (elles-mêmes spoliées pendant la Guerre de Trente Ans à Munich en 1632 et à Prague en 1648), et la collection des Princes italiens Gonzague de Mantoue, qui avait passé à Charles I Stuart puis aux Orléans. Philippe sera donc en possession de la plus grande collection d’Europe, qui inclut Véronèse, Tintoret, Corrège, Piombo, Rembrandt (« le moulin »etc.), Rubens (« le Jugement de Pâris), Titien (« Diane et Actéon ») etc.
Tout ceci sera dispersé entre 1787 et 1792 afin de payer les immenses dettes de jeu de Philippe d’Orléans, dit Philippe-Egalité, celui-là même qui souffla sur les braises des émeutes de 1789 et 1791 et qui votera la mort pour son cousin, le malheureux et débonnaire Louis XVI. Ce qui ne l’empêcha pas de périr lui-même sous la guillotine quelques mois plus tard, dévoré par la Terreur d’une Révolution qu’il avait aidé à grandir. Ce fut un trio de Lords anglais qui s’unit pour acquérir la dernière partie de la grande collection des Orléans, soit plus de 200 toiles et œuvres, nommément le 5e Comte de Carlisle (propriétaire de l’immense Castle Howard), son beau-père Lord Gower, et le Duc de Bridgewater.
L’Angleterre
De l’autre côté de la Manche, et même bien avant les personnages français que je viens de citer, le Duc de Buckingham s’illustre comme collectionneur, puis après sa disparition prématurée sous le poignard assassin d’un puritain, le relais est repris par Charles I d’Angleterre Stuart qui constitua une collection prestigieuse de plus de 400 statues et bustes et des peintures magnifiques dont des Mantegna , des Raphaël (et ses fameux cartons). Lorsqu’à la suite de la guerre civile anglaise, Charles I est décapité en 1649, les Parlementaires puritains dispersent une partie de la collection royale pour en récolter des sommes conséquentes. Le fils du malheureux souverain est restauré sur le trône en 1660 sous le titre de Charles II, et, visant à rendre à sa monarchie un éclat terni par la Révolution, il s’empresse de racheter tout ce qu’il peut des possessions de son père, et même d’augmenter son patrimoine artistique. Nous sommes là devant le démarrage de l’inégalable « British Royal Collection », propriété jusqu’à nos jours de la Couronne. Signe de la Pérennité des souverains britanniques et des immenses moyens dont ils jouirent longtemps, lorsque « Britannia » représentait un Empire mondial et prospère : La « Royal Collection » : cela veut dire aujourd’hui : 7 mille Peintures, 40 mille aquarelles et dessins de maîtres, 150 mille gravures plus des Tapisseries, de la céramique, de l’ argenterie, etc. dont une grande partie est PRÊTÉE aux grands musées nationaux, mais qui sont aussi conservés précieusement dans les demeures des souverains, comme le château de WINDSOR, tout près de Londres.
En Europe, les grandes dynasties impériales et royales des 16e et 17e siècles ne sont pas en reste, cherchant toutes à embellir leurs intérieurs, comme à faire briller leur prestige afin de renforcer leur souveraineté sur les peuples qu’ils gouvernent. Il n’est pas jusqu’à des ducs, marquis et autres principicules de se constituer ce qu’on appela des « cabinets de curiosités » et des « chambres privées, les « studiolo »en italien, où ils amoncelaient des objets allant depuis des ouvrages d’orfèvrerie raffinée jusqu’à des pièces relevant plus du bizarre et de l’ethnologie que de l’Art pur. Les Habsbourg de Vienne et de Madrid, les Wittelsbach de Munich, plus tard les Hohenzollern de Prusse et les Romanov de Russie, et des dizaines d’autres familles souveraines servent de mécènes assidus à l’époque si féconde du baroque.
La Renaissance ayant déchiré les tabous de la toute puissante église sur la représentation du corps humain et surtout ayant remis au goût du jour les beautés de l’époque gréco-romaine, l’Occident se prend d’une passion pour l’Antiquité. Alors, on va en revisiter les hauts lieux, évidemment en Italie où les restes d’un empire écroulé depuis plus de mille ans sont étalés au grand jour. En tête de la course vers Rome et l’Italie se situe la « gentry » anglaise, cette noblesse qui fait d’un voyage vers le Sud une obligation pour tout jeune homme de la « High Society »qui veut se targuer d’une éducation raffinée. Entre 1660 et 1850, ce sont des vagues de jeunes (et moins jeunes) britanniques qui partent pour l’Italie, via Paris, et les Flandres, s’initier à l’Art au culte du « Beau », surtout vers Florence, Rome et Naples au tout premier degré. Viendront ensuite Venise, Padoue, Bologne, et bien plus rarement Milan, Pise, et plus tard, la Sicile et Paestum. Ce voyage « culturel inédit souvent long d’un an, s’intitulera « le GRAND TOUR », en anglais, d’où nous vient notre fameux mot de « TOURISME » !
A partir du milieu du 18e siècle, ce Grand Tour popularise le goût « néo-classique », dont le pape reste l’historien de l’Art ancien, l’allemand Winckelmann (1717-1768). Il ramène dans l’architecture et la décoration des capitales européennes et de leurs monuments les colonnes et les architraves, les portiques et les coupoles .
Cet engouement pour une Antiquité idéalisée va avoir pour conséquence l’introduction dans les demeures prestigieuses des grands (et riches) seigneurs anglais de vastes collections antiques que des marchands italiens leur fournissent à grands bras. Le premier d’une longue, et nombreuse série sera Thomas Howard, Comte d’Arundel, héritier d’une grande famille dont plusieurs membres connurent des fins tragiques sous les Tudor. Toujours sobrement habillé de noir, Arundel avait effectué son Tour en Italie au début du 17e siècle, et, ayant été en contact avec la collection Giustiniani lorsqu‘il vécut chez eux, piazza Navona à Rome, acquit des peinture de Guido Reni, du Caravage, du Caracce etc. entassant ses achats à Arundel House à Londres, au sud du Strand. Sa collection ne vécut que 30 ans et fut bien vite dispersée après sa mort.
Lui succèdent Thomas Herbert, Earl (comte) of Pembroke, Lord Rockingham, Lord Lansdowne, Charles Townley, Henry Blundell, Thomas Hope, Charles Wyndham of Egremont, Weddell, Lord Leicester, la collection Hope, dont les richesses artistiques emplissent des « maisons « de campagne si vastes et si orgueilleuses qu’elles passent à la postérité sous le nom de « Grand Houses ». Dans le lot se distingue un « country gentleman » très fortuné, Charles Townley (1735-1805) qui effectua trois grands Tours et rapporta d’Italie des pièces remarquables, aujourd’hui au British Museum. Ainsi que Henry Blundell (1724-1810), compagnon de route de Townley.
Illustration très vivante du conservatisme insulaire propre aux britanniques, les Grandes demeures outre-Manche ont conservé jusqu’aujourd’hui non seulement leur architecture grandiose, mais aussi beaucoup de leurs collections. Pour n’en citer qu’une poignée ici, mentionnons le Blenheim des Marlborough, le Woburn Abbey des Russell, Ducs de Bedford, le Chatsworth des Devonshire, le Castle Howard des Carlisle, Wilton House des Percy, Knole House et tant d’autres.